Accréditation des Établissements de la Région du Grand Est.

Pour Sup’Recherche-UNSA, la séance du CNESER accréditation l’après-midi du 13 février, a été l’occasion d’attirer l’attention sur les difficultés de soutenabilité des offres ainsi sur la nécessité de s’adosser constamment à la recherche. Nous ne serons pas une grande nation scientifique si nous n’accordons pas les moyens suffisants à la formation des futures générations de chercheurs et enseignants -chercheurs ! Nous avons ainsi rappelé dans une déclaration liminaire :

“Madame la ministre,

Au moment où le CNESER s’apprête à examiner les offres de formation des établissements de la vague C, nous voulons saluer les ambitions et les espoirs que les établissements s’efforcent de porter, au service des étudiants, dans un contexte budgétaire de plus en plus tendu. Nous serons particulièrement soucieux de la soutenabilité des projets présentés et nous voulons affirmer notre soutien aux équipes et à nos collègues qui maintiennent l’exigence d’un service public d’enseignement supérieur accessible et égalitaire.”

Sont concernés les établissements suivants.

  • Université de Reims URCA
  • École supérieure d’art et de design de Reims
  • Université de technologie de Troyes
  • Université de Strasbourg.
  • École nationale du génie de l’eau et de l’environnement de Strasbourg
  • INSA Strasbourg
  • Université de Mulhouse
  • École nationale supérieure d’architecture de Strasbourg
  • Haute école des arts du Rhin-Strasbourg-Mulhouse
  • Université de Lorraine (dont co-accréditations avec Centrale-Supélec Lorraine et AgroParisTech Nancy)
  • École nationale supérieure d’architecture de Nancy
  • École nationale supérieure d’art et de Design de Nancy
  • École supérieure d’art de Lorraine-Metz-Epinal

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CNESER du 12 février 2024

Lors de la séance de la commission permanente du CNESER du 12/2/24, Sup’Recherche-UNSA a tenu à attirer l’attention de la Ministre sur la situation de deux universités : Paris 8  et Grenoble-Alpes

Madame la Ministre,

Nous voulons attirer aujourd’hui votre attention sur les problèmes qui se posent dans deux établissements d’enseignement supérieur où les conditions de travail des personnels sont dégradées.

D’une part, la situation à Paris 8 est délétère. Non seulement les arrêts maladie ont explosé de 64% en un an, contre 8% “seulement en France, mais, à l’université, beaucoup d’enseignant.e.s ne déposent même plus d’arrêt maladie. Pour information, il n’y a plus de médecin du travail à Paris 8 depuis 5 ou 6 ans. Auparavant, il était déjà impossible pendant des années d’obtenir un rendez-vous avec le médecin du travail qui était lui-même, en arrêt maladie. La présidence invoque l’impossibilité de recruter un médecin depuis tout ce temps, mais elle refuse également de faire appel à un conventionnement avec un centre de santé du travail ou même à de simples vacations. La médecine du travail est clairement un droit des salarié.e.s qui n’est pas respecté à Paris 8, alors que la situation de santé des personnels est gravissime.

D’autre part, à la suite de l’annulation des élections des conseils centraux de l’Université Grenoble-Alpes, il est urgent que l’administrateur provisoire clarifie le devenir de la campagne d’emplois, des procédures de repyramidage et de toutes le mesures à destination des personnels en cours, afin de sécuriser la communauté qui manifeste, à juste, titre une vive inquiétude.

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Réforme de la formation des enseignants : 2025 c’est maintenant trop tard !

La procrastination est maintenant, on l’a compris avec la saga du remaniement ministériel, une des caractéristiques du mode de fonctionnement de ce gouvernement. Des formules choc : en septembre le Président de la République annonçait “une formation dès l’après-bac” pour “revenir à un système qu’on connaissait par le passé, qui fonctionnait, qui est un peu celui des Écoles normales” ajoutait-il. Puis un concours de recrutement en fin de L3, décision que Sup’Recherche-UNSA salue cela permettra aux étudiants de master de se consacrer pleinement à une formation professionnelle adossée à la recherche.

Depuis lors… rien ou si peu.

Gabriel Attal a traversé la rue pour trouver un nouveau travail et sa successeure a réussi le coup de force de se mettre à dos la communauté éducative lors de sa première sortie. Le “re-remaniement” n’a pas permis aux choses d’avancer. Aucune incarnation de ce dossier du côté du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche confirmant le sentiment que le dossier de la formation des enseignants était piloté par la rue de Grenelle (ou peut-être, maintenant, rue de Varennes ?)

Pendant ce temps-là les rumeurs circulent dans les INSPE, va-t-il falloir préparer de nouvelles maquettes pour la rentrée 2024 ? Les collègues malmenés par des sempiternelles réformes et de stigmatisation méritent mieux. On se souviendra d’une séance d’accréditation des INSPE, il y maintenant 2 ans, où nous avions demandé à une direction combien de temps elle tiendrait dans les conditions de travail qui étaient les leurs. Elle nous avait alors répondu d’une voix blanche “nous tiendrons car il le faut”.

Sup’Recherche-UNSA demande donc solennellement aux Ministères de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et de l’Éducation Nationale :

  • d’annoncer très vite que les nouveaux concours ne seront pas mis en œuvre avant la campagne 2026;
  • d’associer pleinement les organisations syndicales qui représentent les enseignants et enseignants-chercheurs des universités à l’élaboration de ce projet.

Il doit être mis fin au temps des réformes qui succèdent aux réformes pour construire ensemble dans une temporalité supportable, une formation universitaire des enseignants dont notre pays a besoin.

Nous avons écrit aux ministres de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et de l’Éducation Nationale nouvellement nommée ce courrier : 2024_02_23_Lettre Sup Recherche UNSA

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Le conseil constitutionnel, la loi immigration et les étudiants étrangers : le chien de garde de l’exécutif mord-il assez fort ?

Ce jeudi 25 janvier, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision à propos de la loi immigration1, sur saisine conjointe des parlementaires, de la Présidente de l’Assemblée nationale et du Président de la République, ce qui est très inhabituel.

Emmanuel Macron s’attendait à ce que le Conseil tempère le texte de loi en invalidant les dispositions les plus contestables. Tel n’est pourtant pas le rôle institutionnel du Conseil constitutionnel qui est chargé de la défense de la Constitution, et non de jouer les supplétifs du pouvoir exécutif en panne de majorité.

En ce qui concerne les articles relatifs à l’enseignement supérieur, les dispositions le plus contestées au fond étaient relatifs à la « caution retour » et à l’application de façon généralisée et sans possibilité d’exonération la majoration des droits d’inscription pour les étudiantes et étudiants extra-communautaires. Ces dispositions avaient été massivement rejetées par le monde universitaire2, et auraient conduit la ministre S. Retailleau, à présenter une démission qui aurait été refusée par l’exécutif, dans l’attente de la décision du Conseil.

D’un texte initial qui comportait 27 articles, le Parlement au terme d’une procédure chaotique, avait accouché de 86 dispositions. Il était évident que nombre d’entre elles risquaient ainsi de se trouver sans lien avec le texte initial et d’encourir une censure procédurale du fait de la jurisprudence des « cavaliers législatifs ».

Pour s’en tenir aux dispositions relatives à l’enseignement supérieur, tel est bien le cas des articles les articles 11, 12 et 13 relatifs, d’une part, à certaines conditions de délivrance d’un titre de séjour pour motif d’études, à l’appréciation du caractère réel et sérieux de la poursuite d’études et aux frais d’inscription des étudiants étrangers dans certains établissements d’enseignement supérieur. Elles se sont vues ainsi censurées. C’est donc la fin de la caution retour et des droits d’inscription majorés automatiques.

Plus généralement l’article 19 qui instaurait une condition minimale de résidence en France ou d’affiliation à un régime obligatoire de sécurité sociale au titre d’une activité professionnelle pour bénéficier de certains droits, aides et allocations ou de certaines prestations, qui visait aussi les étudiants, se trouve aussi censuré.

Sup’Recherche-UNSA se félicite certes, d’une telle invalidation de dispositions contre-productives et qui étaient contraires à l’universalisme de nos missions et aux valeurs qui fondent le travail universitaire.

Mais l’argumentation fondée uniquement sur un motif de procédure nous prive d’une affirmation claire par les juges constitutionnels de la valeur des principes hérités des Lumières, fondés sur l’accueil et l’échange des savoirs et de leur nécessaire protection.

Sup’Recherche-UNSA s’engage donc plus que jamais à faire de la défense de ces principes un axe majeur de son action syndicale.

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1 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2024/2023863DC.htm

2 https://franceuniversites.fr/actualite/communique-des-presidentes-et-des-presidents-duniversite-relatif-au-projet-de-loi-immigration/




Compte-rendu du CNESER

Un CNESER s’est tenu le 23 janvier 2024, en ce début d’année, il a été l’occasion de saluer la mémoire de Pierre Coural, décédé en janvier 2024.

Lors du point sur le plan Climat-Biodiversité et les actions en lien avec la transition écologique pour un développement soutenable, Sup’recherche-UNSA est intervenu pour rappeler l’état déplorable de nombre de bâtiments universitaires. On demande aux établissements d’établir des bilans carbone et d’aller vers la sobriété énergétique sans qu’ils aient les moyens de la faire. La solution n’est pas de baisser le chauffage et de distribuer, comme le font certaines universités des polaires, il faut sans attendre, un plan Marshall pour la rénovation thermique des bâtiments. Le patrimoine foncier de l’ESR est le plus important du secteur public, dans ce domaine il faut que l’Etat ait plus que de l’audace mais qu’il nous donne les moyens financiers de l’efficacité dans l’action.

Un bilan du dispositif « Mon master » a été présenté comme « positif ». Mais comment se satisfaire du fait que près d’un tiers des étudiants diplômés de licence n’ont pas formés de vœux sur la plateforme ? Renoncement à la poursuite d’études ou fuite vers des formations hors plateforme, notamment privées ? Acceptons, non sans inquiétude, l’augure d’une amélioration future du dispositif notamment par l’ouverture d’une phase complémentaire. En ce qui concerne le projet de décret modifiant la procédure dématérialisée de candidature et de recrutement en première année des formations conduisant au diplôme national de master ainsi que de l’arrêté fixant la liste des formations dérogatoires, Sup’recherche-UNSA a voté pour, compte tenu des nécessités d’amélioration du dispositif.

Sup’Recherche-UNSA a soulevé le problème des masters qui ne sont pas dans la suite directe d’une seule licence comme en FLE où l’on demande aux étudiants de licence d’avoir validé une « mention FLE », or cette validation n’intervient qu’en fin d’année universitaire. Si l’administration a reconnu le problème, elle n’a pas retenu l’amendement que nous avions déposé permettant de régler la question alors qu’il a été voté largement par les conseillers. Nous ne comprenons pas ce refus !

SUP Recherche UNSA s’est joint à une motion relative à la loi immigration présentée par l’Union étudiante car cette loi constitue une attaque sans précédent envers les étudiants étrangers et heurte de plein fouet le principe universaliste de l’enseignement supérieur. (Motion Union Etudiante) Pour Sup-Recherche-UNSA la solution serait que le Président de la République active l’article 10 de la constitution qui lui permet de « demander au Parlement une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles. »

Enfin, inlassablement, Sup’Recherche-UNSA vote contre les formations d’enseignement développées dans le secteur privé dès lors qu’elles reposent souvent sur les confusions entretenues sur le niveau de diplôme obtenu et des droits très élevés qu’elles demandent. Tel a encore été le cas ce jour, où de plus, un même arrêté confondait formations publiques et privées autorisées à délivrer le grade de licence.

Lors de sa conférence de presse du 16 janvier, Emmanuel Macron demandait l’engagement de tous avec trois maitres mots : « audace, efficacité, action ». Pour que tout cela ne soit pas que de la rhétorique Sup’Recherche-UNSA demande au gouvernement d’avoir l’audace de financer le service public de l’enseignement supérieur, ce qui lui permettra une efficacité dans l’action afin que les étudiants et leur famille soient à l’abri des pratiques de certaines officines privées.

Sup'Recherche – UNSA




Campagne d’avancement de grade des enseignants-chercheurs

La campagne d’avancement de grade des enseignants-chercheurs se déroule entre 18 janvier 2024 – 10 heures (heure de Paris) au 16 février 2024 – 16 heures (heure de Paris).

Elle a lieu en 2 phases (nationale et locale). Pour cela chaque enseignant-chercheur doit établir un dossier candidature comportant un rapport qui rend compte de l’ensemble de ses activités et le  déposer avant le 16 février  sur le portail GALAXIE ICI.

Conditions de promouvabilité  (situation au 31/12/2024)

  • Accès à la hors classe des MCF : être classé au 7ème  échelon de la classe normale des MCF et justifier de 5 ans d’activité en qualité de MCF ou Maître assistant, en activité ou en détachement.
  • Accès échelon exceptionnel des MCF HC : être classé au 6ème échelon de la hors classe et justifier de 3 ans de service effectifs dans cet échelon
  • Accès à la 1ère  classe des PR : être PR 2ème classe (pas de conditions d’ancienneté)
  • Accès au 1er échelon de la classe exceptionnelle des PR : être PR 1ère classe et justifier de 18 mois d’ancienneté dans le grade inférieur.
  • Accès au 2ème échelon de la classe exceptionnelle des PR : être PR classe exceptionnelle 1er échelon et justifier de 18 mois d’ancienneté dans cet échelon.

Quelques liens sur GALAXIE :

Nous vous conseillons de consulter également le site du CNU où vous trouverez les conseils de chaque section.




Décryptage IV, La recherche selon E. Macron

Décryptage IV

Le Président Emmanuel Macron a reçu plus de 300 chercheurs, représentants d’établissements supérieurs, instituts de recherche, institutionnels et chefs d’entreprises, pour présenter sa vision pour l’avenir de la recherche française, le jeudi 7 décembre à l’Élysée. Nous présentons un quatrième et dernier décryptage de cette allocution.

La recherche selon E. Macron

La recherche académique est une démarche qui vise à accroitre nos connaissances. La recherche et développement (R & D) consiste à utiliser les résultats scientifiques pour de nouvelles applications. On dit parfois que le Président Macron voudrait gérer la France comme une entreprise. Effectivement, dans son discours, c’est bien de R & D qu’il parle.

Le président confond la recherche et ses résultats « la science ». Dans un enchaînement récursif, la recherche crée la science (et ses récompenses : les prix Nobel), l’innovation, la technologie, la croissance économique, la création de richesse, qui permettent de financer la recherche. Il souligne que l’absence de lien entre recherche et innovation est une faiblesse, « historiquement une faiblesse française ».

Sup’Recherche-UNSA lui rappelle que la position actuelle de notre pays dans le domaine de la recherche et du développement (R&D) est le résultat de diverses politiques menées sur plusieurs années, qui ont malheureusement mené à un certain décrochage par rapport à d’autres nations.

Tandis que la France alloue 805 € par habitant à la R&D, l’Allemagne y investit substantiellement plus, avec 1270 € par habitant. Cette disparité notable devrait inciter le Président à reconsidérer et à réévaluer de manière approfondie nos stratégies et investissements dans ce secteur primordial. Face à cette situation, Sup’Recherche-UNSA lance un appel pressant à défendre et à renforcer la recherche publique, qui est un pilier fondamental et un moteur de progrès dans ce domaine.

Au niveau de la technologie, il place un diverticule : la technologie, l’excellence, la souveraineté, l’indépendance et la capacité d’une nation à dessiner son avenir. Certes le Président se bat « pour qu’on continue à avoir une science ouverte, vivant sur la coopération et l’ouverture entre les chercheurs, quels que soient les troubles géopolitiques ». Mais comme les autres nations ne raisonnent pas comme lui, nous perdons nos plus belles innovations.

« La science, la recherche de la vérité » est ainsi instrumentalisée par l’entreprise France, dans des buts économiques et politiques.

Les sciences humaines ne sont pas écartées du lot. Il leur attribue une fonction bien précise. « Je considère qu’en particulier les sciences humaines et sociales ont à éclairer l’avancée de la technologie ou des sciences dites dures pour pouvoir cheminer justement ensemble dans la société ». Il n’est pas question ici de développement des connaissances sur l’homme et la société, mais d’une sorte de garde-fou, de conscience morale.

Pour le Président, le chercheur est un savant, ce qui lui confère une autorité : « vous avez lu plus de livres. Et ça représente quelque chose d’un ordre du savoir, d’une légitimité reconnue par les pairs, qui permet ensuite de mener une recherche, mais de dire aussi dans la société des choses qui ont un poids et une valeur. »

Certes, le chercheur accroit nos connaissances en s’appuyant sur des connaissances antérieures. Pour Sup’Recherche-UNSA, ce n’est pas l’érudition qui fait la qualité de la recherche. Il y a aussi les qualités du chercheur qui sont : la disponibilité intellectuelle, la curiosité et la rigueur, la créativité et l’esprit critique (y compris vis-à-vis de son propre travail). On peut y ajouter la capacité à travailler en équipe et à communiquer.

La recherche scientifique est une démarche rigoureuse qui vise à de nouvelles connaissances, utiles ou inutiles, par l’administration de diverses sortes de preuves. Ce qui fait sa valeur ce n’est ni l’utilité des résultats ni l’autorité du savant, c’est la confiance qui résulte de la démarche évaluée par les pairs.

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Décryptage III, l’Enseignement supérieur porte d’entrée de la recherche

Décryptage III

Le Président Emmanuel Macron a reçu plus de 300 chercheurs, représentants d’établissements supérieurs, instituts de recherche, institutionnels et chefs d’entreprises, pour présenter sa vision pour l’avenir de la recherche française, le jeudi 7 décembre à l’Élysée. Nous présentons un troisième décryptage de cette allocution.

L’Enseignement supérieur porte d’entrée de la recherche

Lors de son récent discours, le président de la République a utilisé treize fois le terme « agence » et plusieurs fois le mot « classement », exprimant ainsi son désir de transformer nos grands organismes nationaux de recherche en véritables structures visant une certaine forme d’excellence. Cependant, le président n’a pas détaillé la nature spécifique de ces transformations ni les implications concrètes de ce changement.

Pour Sup’Recherche-UNSA, cette orientation risque de détourner les EPST de leur objectif principal, qui est de conduire des recherches considérées comme non lucratives, mais essentielles pour la France.

Cette approche, probablement influencée par le « complexe de Shanghai », omet un aspect crucial : l’avenir de l’enseignement supérieur et de la recherche à l’université. C’est essentiel pour le développement de notre pays, mais c’est compromis par un sous-financement chronique depuis la mise en œuvre de la Loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU). La LPR n’a pas permis de combler le retard en matière de financement des missions de l’enseignement supérieur, pour cela il aurait fallu une autre loi de programmation.

La référence au classement de Shanghai conduit inévitablement à un marché des universités, passant ainsi d’une logique de service public à une logique de rentabilité élitiste de la recherche et sans aucun doute, de l’Enseignement Supérieur, déjà bien présent dans l’économie de marché.

Il est donc impératif de rappeler au Président que nos établissements d’enseignement supérieur ne sont pas seulement des centres de recherche, mais ont aussi une mission de transmission des savoirs qui mène un certain nombre d’étudiants à embrasser des métiers liés à la recherche. La formation des étudiants de licence, master, doctorat est le terreau des prix et reconnaissances internationaux (Nobel, médaille Fields, etc.).

Notre objectif principal devrait être l’étudiant, en maintenant la qualité et la pertinence de notre système éducatif, de notre recherche et du service public.

Pour Sup’Recherche-UNSA, aucune nation ne peut avoir une recherche de haut niveau sans un enseignement supérieur de haut niveau.

Faut-il également rappeler que les universités jouent un rôle d’ascenseur social fondamental, portant les espoirs du pacte républicain ? Pourtant, chaque année, un grand nombre d’étudiants se retrouve sans affectation, en L1 comme en master, en raison de l’insuffisance de places. Le droit aux études supérieures doit être garanti à chacune et à chacun. Il faut ouvrir des places, en premier cycle ainsi qu’en master, pour garantir l’égalité des chances pour toutes et tous et sur tout le territoire.

La diminution d’année en année des financements de l’État pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche se traduit au niveau des établissements par le gel des campagnes d’emplois statutaires pour réduire les déficits creusés par le désengagement de l’État. Les universités recourent de manière accrue à des contractuels ou des vacataires, se traduisant par un accroissement de la précarité et par une surcharge de travail pour les titulaires. Ainsi, la réduction persistante des ressources financières et du nombre d’enseignants-chercheurs qualifiés entrave gravement l’accès à l’enseignement supérieur public. Cette situation place la jeunesse dans une position intenable, l’obligeant souvent à se tourner vers des alternatives onéreuses et de piètre qualité offerte par le secteur privé. Ces coûts élevés des formations privées non seulement limitent l’accès à l’éducation pour une grande partie de la population, mais contribuent également à creuser les inégalités socio-économiques.

Sup’RechercheUNSA demande un retour à un financement à la hauteur de ce que peut espérer une « grande nation de savoirs » digne des objectifs du pacte républicain. Il lui faut aussi des soutiens solides pour accomplir sa double mission d’enseignement et de recherche, et ainsi contribuer pleinement à l’avenir de notre nation.




Décryptage II : des statuts pas si stupides que cela !

Le Président Emmanuel Macron a reçu plus de 300 chercheurs, représentants d’établissements supérieurs, instituts de recherche, institutionnels et chefs d’entreprises, pour présenter sa vision pour l’avenir de la recherche française, le jeudi 7 décembre à l’Élysée. Nous vous proposons un deuxième décryptage de cette allocution :  « Donc je n’ai pas dit qu’on allait réformer les statuts. Mais à la fin des fins, qu’est-ce qu’on veut ? On veut que vous puissiez former, recruter, garder les meilleurs chercheurs au monde et les attirer. On veut que ça puisse se faire dans une très grande liberté académique et donc que ce soit entre pairs que ce soit décidé. Mais après, on veut quand même simplifier la vie de tout le monde et que ce soit au niveau des équipes, que les choses se décident avec beaucoup plus de liberté. Et moi, je suis incapable de dire au fond s’il faudrait 100 % de temps de recherche pour la même personne tout au long de sa vie, et c’est sans doute une stupidité absolue de notre système. Tout ça parce qu’il est rentré à 25 ans dans un système et peut-être que cette même personne, elle aura à un moment donné envie de faire un peu plus d’enseignement. Les choses selon les disciplines, selon sa vie, ses choix font qu’on a peut-être à un moment envie de faire plus d’enseignement, plus de recherche, plus de clinique. Les statuts ne sont pas des protections aujourd’hui, ce sont devenus des éléments de complexité. Donc moi, je vous invite très sincèrement, vous êtes beaucoup plus intelligents que moi, tous dans cette salle, à les changer vous-mêmes. À mon avis, c’est le meilleur truc à faire ; c’est-à-dire qu’il faut préserver du temps de recherche pour les gens qui sont très bons, qui en ont envie ou autres. Se dire d’ailleurs qu’à mon avis, pour les très bons chercheurs, moi, je parle sous le contrôle de gens qui font ça, j’ai beaucoup d’admiration. Il y en a qui considèrent que l’enseignement nourrit leur recherche. Et moi, je crois vraiment qu’on a une approche et on a en quelque sorte sur ce sujet des guerres de tranchées qui sont d’un autre âge. On va continuer de donner plus de moyens et j’en serai le garant devant vous. »

Que dire de cet extrait de discours ?

Il est un encouragement à s’affranchir « des statuts » des personnels de la recherche dans les EPST, c’est-à-dire essentiellement des chargés de recherche et des directeurs de recherche. Ces statuts ont plusieurs caractéristiques : ils rattachent ces personnels à la fonction publique de l’État au sein d’établissements publics et leur confient une mission entièrement dédiée à la recherche scientifique assortie en pratique de possibilités de mobilité renforcées par rapport à celle d’un enseignant-chercheur par exemple. Ces statuts reposent pour l’essentiel sur la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État et du décret n° 83-1260 du 30 décembre 1983 modifié fixant les dispositions statutaires communes aux corps de fonctionnaires des établissements publics scientifiques et technologiques.

Or, dans le monde de la connaissance scientifique, les statuts n’ont pas été élaborés par dogmatisme, mais bien pour permettre l’accomplissement correct des missions de ces fonctionnaires définies dans l’Article L411-1 du Code de la recherche1.

L’ensemble de ces missions nécessite aujourd’hui encore que soit garantie l’indépendance de la recherche, que cette indépendance soit intellectuelle ou matérielle.

Il faut rappeler que lorsqu’il a statué sur le cas des enseignants-chercheurs, le Conseil constitutionnel a dit que, « par leur nature même, les fonctions d’enseignement et de recherche non seulement permettent, mais demandent, dans l’intérêt même du service, que la libre expression et l’indépendance des personnels soient garanties par les dispositions qui leur sont applicables ». Il n’y a aucune raison de penser que le raisonnement puisse être différent en ce qui concerne les chercheurs dont l’indépendance découle aussi de la sécurité statutaire : « Le principe d’indépendance implique que l’activité de recherche puisse se déployer de manière libre, non seulement à l’abri des pressions des pouvoirs de toute nature, mais encore en échappant aux déterminismes de tous ordres susceptibles de bloquer la réflexion »2.

Outre les possibilités d’ancrage constitutionnel dont il bénéficie, le principe d’indépendance de la recherche trouve aussi une expression dans les textes européens qui s’imposent au législateur français, telle la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui énonce dans son article 13 que « Les arts et la recherche scientifique sont libres. La liberté académique est respectée » suivant en cela nombre de constitutions européennes, notamment l’article 5 Loi fondamentale Allemande3.

Il n’y a donc aucune raison de dire que si le statut a été pensé comme une garantie du principe d’indépendance de la recherche, cette construction soit devenue obsolète aujourd’hui.

Quel sens donner à l’invitation de changer les statuts « vous-mêmes » ?

Si l’on suit le sens du discours, le Président semble surtout se référer à l’idée de moduler les obligations entre les missions de recherche et d’enseignement tout au long de la carrière. Est-ce à dire que l’on puisse imposer des missions d’enseignement aux chercheurs, sur quels critères et dans quelles proportions ?

D’abord, il est légitime de s’interroger sur le bien-fondé d’une telle opinion, qui conduit à déshabiller la recherche française au moment où l’on reconnaît qu’elle manque d’attractivité.

Ensuite si l’on fait cela « sans toucher au statut », cela revient à pousser les feux de la contractualisation, probablement par le recours massif à des embauches à temps et « hors statuts »4. Cette technique, utilisée en son temps pour la SNCF ou France Télécom, n’est pas sans produire nombre d’effets pervers. Gageons qu’ils seront maximisés dans un domaine où les compétences peuvent rapidement se trouver dévalorisées, si les chercheurs ne trouvent pas dans leur statut même, des garanties de formation et de reconversion…

Sup’Recherche-UNSA, demande que l’on ne s’affranchisse pas purement et simplement des statuts, condition institutionnelle de l’indépendance de la recherche. « Il est parfois nécessaire de changer certaines lois mais le cas est rare et, lorsqu’il arrive, il ne faut y toucher que d’une main tremblante » (Montesquieu, De l’esprit des lois, 1748), il en est de même des statuts des chercheurs et des enseignant-chercheurs.

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1 Les personnels de la recherche concourent à une mission d’intérêt national. Cette mission comprend :
a) Le développement des connaissances ;
b) Leur transfert et leur application dans les entreprises, et dans tous les domaines contribuant au progrès de la société ;
c) L’information des citoyens dans le cadre de la politique nationale de science ouverte et la diffusion de la culture scientifique et technique dans toute la population, notamment parmi les jeunes ;
d) La participation à la formation initiale et à la formation continue ;
d bis) La construction de l’espace européen de la recherche et la participation aux coopérations européennes et internationales en matière de recherche et d’innovation ;
e) L’administration de la recherche ;
f) L’expertise scientifique.
2 Jacques Chevallier. L’indépendance de la recherche. Indépendance(s). Mélanges en l’honneur de Jean-Louis Autin, Presses universitaires de Montpellier, pp. 197-214, 2011. ‌hal-01722510.
3 Ainsi le Tribunal constitutionnel allemand dans un arrêt du 24 mai 1973 fondé cet article estime que la liberté de la recherche dépend d’un autre principe : le principe de l’indépendance des universités.
4 On songe à un recours massif à des contrats de « chercheurs associés ».



Voeux de Sup’Recherche-UNSA à la communauté de l’ESR

Sup’Recherche-UNSA présente tous ses meilleurs vœux à l’ensemble de la communauté universitaire : actrices et acteurs du service public de l’ESR, partenaires sociaux et usagers : étudiant.e.s en formation initiale et celles et ceux qui sont en reprise d’études.

Nous souhaitons qu’en 2024, L’État reconnaîtra mieux et en actes,  notre action collective au service des usagers de l’ESR  et plus largement de la société.

Nous rappelons que l’obtention d’un prix, le Nobel, d’une médaille Fields est le fruit du travail de toute une équipe. C’est l’ensemble de la cordée qui doit être considérée et pas simplement les “premiers de cordée”. En montagne, le premier de cordée est assuré par celles et ceux qui le suivent. S’il chute, c’est la cordée dans son ensemble qui le sauvera.

Comme il est rare que l’on gravisse seul un sommet, il est rare qu’un.e seul.e fasse avancer la science.