Le conseil constitutionnel, la loi immigration et les étudiants étrangers : le chien de garde de l’exécutif mord-il assez fort ?
Ce jeudi 25 janvier, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision à propos de la loi immigration1, sur saisine conjointe des parlementaires, de la Présidente de l’Assemblée nationale et du Président de la République, ce qui est très inhabituel.
Emmanuel Macron s’attendait à ce que le Conseil tempère le texte de loi en invalidant les dispositions les plus contestables. Tel n’est pourtant pas le rôle institutionnel du Conseil constitutionnel qui est chargé de la défense de la Constitution, et non de jouer les supplétifs du pouvoir exécutif en panne de majorité.
En ce qui concerne les articles relatifs à l’enseignement supérieur, les dispositions le plus contestées au fond étaient relatifs à la « caution retour » et à l’application de façon généralisée et sans possibilité d’exonération la majoration des droits d’inscription pour les étudiantes et étudiants extra-communautaires. Ces dispositions avaient été massivement rejetées par le monde universitaire2, et auraient conduit la ministre S. Retailleau, à présenter une démission qui aurait été refusée par l’exécutif, dans l’attente de la décision du Conseil.
D’un texte initial qui comportait 27 articles, le Parlement au terme d’une procédure chaotique, avait accouché de 86 dispositions. Il était évident que nombre d’entre elles risquaient ainsi de se trouver sans lien avec le texte initial et d’encourir une censure procédurale du fait de la jurisprudence des « cavaliers législatifs ».
Pour s’en tenir aux dispositions relatives à l’enseignement supérieur, tel est bien le cas des articles les articles 11, 12 et 13 relatifs, d’une part, à certaines conditions de délivrance d’un titre de séjour pour motif d’études, à l’appréciation du caractère réel et sérieux de la poursuite d’études et aux frais d’inscription des étudiants étrangers dans certains établissements d’enseignement supérieur. Elles se sont vues ainsi censurées. C’est donc la fin de la caution retour et des droits d’inscription majorés automatiques.
Plus généralement l’article 19 qui instaurait une condition minimale de résidence en France ou d’affiliation à un régime obligatoire de sécurité sociale au titre d’une activité professionnelle pour bénéficier de certains droits, aides et allocations ou de certaines prestations, qui visait aussi les étudiants, se trouve aussi censuré.
Sup’Recherche-UNSA se félicite certes, d’une telle invalidation de dispositions contre-productives et qui étaient contraires à l’universalisme de nos missions et aux valeurs qui fondent le travail universitaire.
Mais l’argumentation fondée uniquement sur un motif de procédure nous prive d’une affirmation claire par les juges constitutionnels de la valeur des principes hérités des Lumières, fondés sur l’accueil et l’échange des savoirs et de leur nécessaire protection.
Sup’Recherche-UNSA s’engage donc plus que jamais à faire de la défense de ces principes un axe majeur de son action syndicale.
Image par Mohamed Hassan de Pixabay
1 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2024/2023863DC.htm
2 https://franceuniversites.fr/actualite/communique-des-presidentes-et-des-presidents-duniversite-relatif-au-projet-de-loi-immigration/